vendredi 14 août 2009

Vardo – Alta



Depuis hier, je suis de retour dans le même fuseau horaire que vous, lecteurs parisiens. Je viens de le découvrir à la réception de cet hôtel des bois en bord de mer et sous les cimes enneigées. Pas d'inquiétude, on va remettre tout cela dans l'ordre.

Réveil à l'aube, donc… le lever 8h, départ 9h s'est subrepticement transformé en lever 7h, départ 7h45. Heureusement que le petit déjeuner était servi à partir de sept heures, je me serais senti un peu bête…

Routes sublimes sous le soleil et les giboulées que je vous raconterai au retour du musée d'Alta… et du dîner (burgers d'élan grillés, bière, café). C'est-à-dire maintenant.

Repartons donc de ce sympathique port de Vardo. Je ne lui ai pas rendu justice hier soir.

Vardo est sur une île, face à la Russie, on y accède en longeant le Varangerfjord, et en passant les deux villages de Nesseby (avec sa petite église de bois blanc, témoignage de foi isolé au bord du fjord, la carte postale inévitable et si belle quand la lumière s'y prête) et de Vadsø (là, juste la vraie vie, le centre commercial et les stations services, ainsi que l'hôpital… et des pistes de ski de fond). Météo oblige, pas de clichés cette année ici. Car comme je l'ai dit, l'eau des nuages rejoint celles de la mer de Barents, sous forme de pluie puis de fusion indistincte. Et pourtant, ce fjord est impressionnant. Par sa taille d'abord. Par la splendeur turquoise de son eau. Par, comment dire, sa détermination : il est le plus septentrional des fjords, même le U des vallées glaciaires n'a pas pu supporter sans adaptation les outrages d'un climat impitoyable. Et parce que la vie s'y accroche, de ses villages actuels à un habitat préhistorique.

On accède à ce petit port de pèche (et station radar avancée de l'OTAN…) par un tunnel qui plonge 80 mètres sous l'océan (c'est le panneau à l'entrée qui le dit, si vous voulez vérifier…) juste après les pistes de l'aéroport. Car Vardo comme Vadso ont leur aéroport. On y pêche notamment le crabe royal du Kamchatka, que les soviétiques ont introduit en douce dans la mer de Barents et qui y prolifère à la plus grande joie (maintenant) des pêcheurs.

L'hôtel – l'unique hôtel – est plus utilitaire que charmant, mais la cuisine y est convenable. Ma chambre est une « single » type : pas très bien fichue ni la mieux placée, mais quand même sur le port. Au bilan, une bonne étape.

La météo détestable me prive de la balade qui m'avait fait privilégier Vardo à Gamvik : Hamninberg, moins pour le village perdu au bout du monde que pour les oppositions de la roche et de l'eau, du vivant et du minéral qui y composent un hymne que je ressens profondément. Avec une visibilité de moins de 10 mètres, il n'au aura aucun plaisir mais un réel danger sur cette route étroite, sinueuse et bordée tantôt de rochers et tantôt de rien. Alors, une pensée pour ce lieu improbable, une autre pour le septentrional Gamvik, avec son micro-hôtel… lot de consolation, j'ai emprunté un des plus beaux tronçons de la route de Gamvik ce matin. D'ailleurs, on va finir par y arriver.

Donc, départ de Vardo sous trois gouttes, sans pire.

Le temps se lève vite, et le Varanger défile sous le soleil mélé de violentes mais courtes ondées. Le fond du fjord atteint, un peu de route banale pour Tana Bru, et cap au nord sur la 98, la plus belle route que je connaisse. Elle commence en beauté par la descente de la Tana, vallée étroite qui va alimenter le Tanafjord, puis cap plein ouest avec plein de convolutions pour suivre les 70°30 N. La route devient plus étroite et son revètement détestable, craquelé, boursouflé, ondulé… Si vous avez un proche qui est malade en voiture, je vous conseille ce tronçon : il tourne, il monte, il descend, sans aucune visibilité, il est étroit et il secoue plus qu'une piste ! Zut, vous aviez oublié votre sac en papier ? Comme je suis désolé.

Les gros pneus du Tiguan font merveille pour contribuer à mon confort, et le couple amélioré est fort agréable pour gérer en douceur ces montagnes qui ont su ne pas devenir russes. Je rale quand même intérieurement quand les affaissements de chaussée rendent la tenue de cap hasardeuse. Et je dois alors le souvenir que les Vikings ne sont pas commodes. Puisque je râle, plus de route. Oui, tout d'un coup, plus de route. Une sorte de chantier s'est débarrassé de la route initiale et prépare le soubassement de la prochaine. Résultat, une piste temporaire de cailloux pleine de trous envahis par l'eau – je vous ai dit qu'il avait plu ces derniers temps ? Les 23 derniers jours… j'apprécie les quatre roues motrices pour ne pas me traîner si je veux garder la maîtrise de ma situation. Un gros camion de chantier s'engage devant moi (bon, il est nettement plus gros, je ne dis rien), il fonce (à 40 km/h) et je le suis au milieu de trombes de boue. Quant il s'efface à gauche je fais de même, et me retrouve sur le parking des engins… malin… et c'est reparti, route infâme mais décor sublime, de nature aride et de roche, de torrents et de lacs qui s'accroche improbablement. La descente sur le Lakselfjord est un grand moment esthétique. Remontée sur les plateaux arasés par les glaciers, et à partir de la redescente vers Lakselv, la route devient superbe aussi au plan technique.

Après Lakselv, le changement de paysage est total, et il reste le même. Comment dire : la route va suivre un large torrent que l'on voit si peu profond et si vif, dans un paysage où plus d'arbres ont su parfois s'accrocher, alors qu'avant tout était miniaturisé tels des bonsaïs. Pas de doute, on est toujours dans un espace où chaque étincelle dit la difficulté et la beauté de vivre, mais le dit avec un autre accent.

Déjeuner à Lakselv de mouton rôti et d'une fine gaufre repliée. Quand je la déplie, je trouve un petite tranche du fromage aigre-doux typiquement norvégien. C'est particulier… le tout est bien sur arrosé de l'inévitable café.

Parce que, s'il y a toujours de rennes partout, il y a aussi une ribambelle de moutons qui errent. Il faut dire que si en Finlande Sames et Finlandais peuvent posséder des rennes, ici ce droit n'est concédé qu'au seuls sames. Les autres habitants élèvent donc des moutons gras à l'épaisse fourrure et à la chair gouteuse. Là, je suppose que je ne vais pas faire l'unanimité, mais je n'ai pas de sympathie pour le mouton aseptisé de l'hexagone, je préfère de loin les bêtes savoureuses comme ici. Mais attention, je n'ai pas parlé de saveur d'agneau, bien de mouton.

Comme les giboulées torrentielles alternent toujours avec le soleil, allez donc faire un tour sur Picasa, il y a quelques photos que j'aime bien.

Le passe aussi à coté de quelques neiges tardives, et me voila qui remonte vers la mer et Alta.

Pardon ? Pas logique ?

Certes.

En fait, les quelques 50 derniers km ou presque se font sur un large plateau ondulé seulement par les moraines et où coule largement mais sans profondeur un beau torrent plein de pêcheurs (donc je suppose de poissons aussi), et il coule vers l'est. Facétie des thalwegs, la séparation des eaux est toute proche d'Alta, ce qui fait que l'on a la curieuse impression, qui est d'ailleurs une réalité, de monter presque jusque au dernier moment vers ce port atlantique !

Là, pas de difficulté pour trouver l'hôtel qui est en pleine métamorphose, de l'auberge de jeunesse améliorée à l'hôtel au centre d'un golf en création… très correct, et savoureux (et copieux).

J'ai le temps de voir et photographier les gravures rupestres d'Alta. Ces deux tomes de bandes dessinées préhistorique en bordure de mer sont rendus accessibles (et préservés) par des chemins de bois à l'instar des zones humides et/ou fragiles de parcs. Les gravures sont variées et détaillées. Superbe étape. On y voit des chasseurs tenant leur gibier, des petits rennes dans le ventre de leur mère, de grands bateaux… Le wikipedia du temps !

Une grande et belle étape, que l'on devrait développer comme le méritent 542 km parcourus en près de 9h. Mais ma couette se fait insistante, et la route de demain (pure montagne) doit me trouver dispos.

A bientôt !

PS : comme d'hab, ce blog est écrit au fil des doigts et de la pensée, et pas relu sérieusement. Alors, pour les coquilles, partagez les reproches aussi avec monsieur Word, sur lequel je tape ceci, et dont les talents de correcteur sont contrastés.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire