jeudi 6 août 2009

Hossa : Peintures rupestres du Somer

Hier soir, vers minuit, le soleil était couché, mais la lumière crépusculaire permettait de voir parfaitement. Une sorte de brume basse formait une langue très localisée au fond du lac de ce côté pour disparaître au milieu. C'était féérique, onirique. J'ai essayé de la photographier, je ne sais ce que cela donne car je n'ai pas encore copié les photos sur l'ordinateur, et l'écran de celui-ci est assez moyen pour les photos.

J'ai programmé mon iPod pour me réveiller à 9 heures. Le misérable se contente de trois bips d'une parfaite discrétion. Qu'importe, mon horloge interne s'est adaptée et je suis prêt à les entendre. Je me lève un quart d'heure plus tard, pour trouver un ciel uniformément bleu, pas un souffle de vent et une température que j'évalue à une quinzaine de degrés. Tout à l'heure, la voiture me dira 17°C.

Je me dirige vers le petit déjeuner dans le restaurant. Je crois que je l'avais décrit l'an dernier, mais au cas où vous auriez oublié, l'hôtel est formé de trois zones : des petits chalets avec kitchenette, qui s'égrainent le long du lac sur une centaine de mètres, un pavillon d'une trentaine de chambres où je loge, qui donnent pour la moitié sur le lac, l'autre sur la route (je suis sur le lac) et enfin le pavillon central avec la réception, la cuisine, la piste de dance (non, pas active en ce moment - heureusement), le bar et la salle de restaurant. Donc petite marche de 50 mètres pour me rendre au restaurant, table sur le lac tranquille et surprise, un groupe de français (une dizaine, à leur conversation que seul un sourd pourrait éviter, il doit s'agir d'un circuit nature accompagné) et un autre couple hexagonal avec deux petites jumelles (je dirais 5 ans). Comme il y a pas mal de voitures finlandaises sur le parking face aux chambres et que je n'en vois que deux ou trois tables, j'imagine que nous n'avons pas les mêmes horaires.

Petit déjeuner des plus classiques sans grande originalité, trois sortes de pain (mie blanche, noir un peu genre seigle complet, et aussi ces petits pains plats noir assez typiques. Coté garniture, sorte de jambon, de salami et deux sortes de harengs (cela, le matin, non je n'ai même pas essayé), fromage, concombre et tomates. Il faut y ajouter les cornflakes, le lait et l'espèce de yaourt local, et aussi et surtout la spécialité de la Finlande centrale (Carélie), un gâteau individuel en forme de barque, dont le bordage de pate emprisonne ce que faute de mieux j'appellerai du porridge (je suis quasi sur que c'en est). Cela tient fort bien au corps et n'est pas mauvais. Ici, la pate est bien fine

Pause ! Comme j'écris ces lignes, un Finlandais ventripotent sort du sauna une serviette autour des reins, se dirige vers le bord du lac… et renonce. Il fait peut-être trop chaud en bas pour lui ? Tout fout le camp…

On revient au petit déjeuner, juste pour signaler que le café est bon, ce qui est une des (nombreuses) supériorités de la Finlande sur les autres pays nordiques, où il est généralement de (sale) type américain.

Comme la météo est incertaine malgré ce ciel tout bleu, j'ai choisi pour aujourd'hui un circuit court, qui doit me conduire à des peintures rupestres sur une falaise au nord-ouest du parc de Hossa.

Alors que je m'engage sur le chemin du centre de nature (il est à 5 km de l'hôtel, et j'en ferai encore une quinzaine pour rejoindre mon point de départ), un troupeau de rennes pose joyeusement au bord de la route. J'ai quelques gros plans sympathiques. Je continue et la bonne et très belle route qui emprunte un esker (la langue de roches et de sable assez haute qui sépare deux lacs naturellement) cède la place à un carrefour où je prends à droite à une piste. Un peu plus loin, je me trouve, parfaitement au centre de la piste, un jeune renne, qui trotte joyeusement (cela ne fait pas vite) sans s'écarter le moins du monde, en jetant de temps en temps un œil pour voir si je suis toujours là. Je le suis, et cela ne me dérange à vrai dire pas le moins du monde de regarder jette croupe gracieuse toute pâle alors que le reste de sa robe est d'un beige plus soutenu. S'il se fait tatouer, il pourra essayer de passer pour une gazelle de Thompson…

Il finit par renoncer à ce jeu, je le laisse à ses occupations et m'arrête au premier parking qui annonce le chemin des peintures.

Et c'est une erreur !

C'est bien un parking, c'est bien le chemin des peintures, mais celui là c'est pour les courageux, une parcours de liaison supplémentaire de 3 km à travers bois. Qu'à cela ne tienne, j'y vais. Un mot sur mon équipement, alors que la pluie se renforce pendant que j'écris (il va être 6 heures ici, le temps de me diriger vers le sauna).

(Je reprends la rédaction après un bon sauna et un peu de repos ensuite.

Mon équipement, donc. J'ai confiance dans un sol raisonnablement sec, donc aux pieds les Aigles Ténéré avec des chaussettes de tennis. Pantalon : le bon vieux jean, épais et résistant à d'éventuelles broussailles ou bestioles. En arrivant sur le parking, je remplace mon t-shirt thaï de l'hôpital pour éléphants par le synthétique de EveryTrail. J'emmène la parka au cas où les nuages et la pluie apparaitraient, et l'appareil photo dans son sac en bandoulière (vraiment très pratique, mais avec le nouveau zoom son poids commence à se faire sentir). Si au repos je peux porter le blouson, quelques minutes de marche prouvent que c'est impossible, et je l'attache autour de ma taille. Entre la matière qui n'accroche pas et ma bandoulière qui doit le pousser, il ne tient vraiment pas bien et je fais quelques kilomètres à le remettre régulièrement. Ma patience se lassant, l'imagine de l'accrocher en bandoulière au dessus du sac. Bingo, je finirai le parcours ainsi. Cela tient chaud, mais moins que sur moi, et cela tient sans problème.

(Suite du récit, l'auteur ayant le ventre (et les yeux pleins)).

Quand je dis que cela tient chaud, je vais ruisseler de sueur sur une bonne partie du parcours, la parka est localement humide et le fond (extérieur, heureusement) du sac de l'appareil est trempé. Tant pis. C'est qu'ici, c'est bien vallonné même si cela culmine vers 300 mètres. Je veux dire que tu passes sans arrêt de 200 à 250 voir 300 mètres (mon GPS dit que j'ai oscillé entre 183 et 308 mètres. Les trois cent huit, je sais quand !! Soit un dénivelé parcouru en montée et en descente cumulé de 440 mètres avec des pentes en moyenne de 6% - cela, c'est vrai en moyenne, car un long faux plat pendant le parcours de liaison fausse le calcul. J'y reviendrai, patience. Cela me fait dire que le peu d'exercice que j'ai fait à porté ses fruits, je n'étais ni essoufflé ni courbatu pendant ni maintenant ! J'admets que je vais bien dormir !

La première partie, balisée de marques rondes orange, disons comme des oranges à deux mètres sur le tronc des arbres n'est qu'une sente entre nulle part et nulle part, au milieu de la forêt. Bien sur de temps en temps un lac à droite à droite ou à gauche , pour la variété, mais si je commence à vous dire à chaque fois que je longe un lac… au vrai, ici je n'en longe pas au début, ou plutôt j'en surplombe deux de mi-colline. Un renne, au loin, apparait, mais je n'ai pas le temps de le photographier. La photo ne le rendrait pas, mais un renne au milieu d'une forêt ou un renne au bord d'une route, cela ne produit pas le même effet. Les arbres sont assez écartés, nombre d'entre eux sont tombés, avec des marques de feu (dues aux orages) ou vrillés par des tempêtes. Le silence n'est guère brisé que par le craquement des brindilles sous mes pas et le froissement du tissu de la parka. Il s'y mêle le chant de quelques oiseaux, mais somme toute pas tant que cela. La piste, une fine sente vraiment parfaitement balisée, sinue, monte, descend sur le doux tapis d'aiguille des pins, que constelle des rocs laissés par les glaces. Les fourmis sont nombreuses, de la petite bestiole qui nous est la plus familière au gros modèle (comme une grosse mouche, disons).

Trois kilomètres et j'arrive au second parking, celui des connaisseurs paresseux. La commence la boucle de 8 km que je voulais vraiment faire. Je ne regrette vraiment pas l'approche, très belle et très isolée. Je ne sais pas bien le rendre : ce chemin bien balisé n'est en même temps, la plupart du temps qu'une sente de la largeur d'une chaussure qui se suit comme la trace d'un animal qui aurait si souvent parcouru son domaine qu'il a marqué par le creusement de l'humus un serpentement dont la logique est d'une autre nature.

Abri en bord de lac et WC, je passe et longe des rapides (oh, si modestes !) qui se transforment bientôt en cours paisible avant de reglouglouter plus vivement à destination. Le sol est très inégal, les pierres le disputent aux racines pour compliquer la marche du randonneur sur quelques 4 kilomètres. Pas grave, mais cela ne fait pas marcher vite. Et on monte, et on descend… plusieurs montées se font grâce à des escaliers de bois, sans aucun doute autant pour la sécurité des randonneurs que pour la protection du milieu – il s'agit quand même d'un site exceptionnel et à en juger par la profondeur parfois du chenin, bien fréquenté. Moi, je croiserai quatre personnes, deux couples.

Juste avant la diversion vers les peintures rupestres, re bonne montée puis bonne descente m'emmènent à une sorte de gite sommaire, comme une tente en bois et à un point pour feu (et WC…). Je continue selon le balisage en ce joli bord de lac profond et encaissé, et la après un joyeux raidillon préparatoire, volée de marches, qui dévoile quand on commence l'ascension son étendue : 122 marches – je les ai comptés. Et j'au eu l'occasion. En effet, en haut, je m'attendais à une passerelle de bois et aux peintures. Nenni. Je trouve plutôt un croisement de sentes avec trois panneaux. Je sois parfaitement où je suis, je viens de rater un embranchement qui menait sur quelques centaines de mètres aux fameuse peintures. D'ailleurs, ironie cruelle, je vois bien au bord du lac la seule et unique falaise où elles peuvent m'attendre depuis quatre ou cinq mille ans…

C'est simple, il n'y a qu'à redescendre les 122 marches, revenir au campement et là prendre à droite et non à gauche. Pour une fois, le balisage pourtant bien présent est moins visible. Ce n'est pas une excuse, parce que la carte que j'ai était limpide. Disons que j'étais un peu fatigué.

Je traverse sur un robuste pont de rondins du cru le ruisseau que j'avais longé et qui se déverse du lac avec quelque vivacité chantante, je fais quelques dizaines de mètres avant de me trouver devant une sorte de ponton qui longe, à quelques mètres, la falaise et conduit le visiteur aux peintures. Celles-ci datent d'entre 3500 et 2000 avant JC, elles représentent des personnages à la tête triangulaire (petit mention, nez marqué et deux yeux), et des rennes plus quelques autres signes plus ou moins déchiffrables. C'est beau, un peu magique. Je suis bien sur seul sur le ponton. Enfin, sur le ponton. Parce que, dans l'espace entre ponton et falaise, cela grouille de poissons dont les sauts hors de l'eau pour gober des proies est bien le vacarme le plus terrible de cet endroit. L'état de conservation est assez remarquable quand on songe au climat du lieu, et s'explique (pour une fois, il y a une notice en anglais sur le ponton à coté de celle en suomi) précisément par les pluies, qui ont dissous une forme de silicate de la falaise qui s'est déposée telle un vernis naturel sur les peinture pour nous les transmettre. Autre point remarquable, elles sont des centaines de km plus au nord que les autres témoignages analogues en Finlande, et n'ont été trouvées par hasard par deux skieurs (sur le lac gelé) qu'en 1977 !

Belles photos, j'espère, car la lumière était parfaite, et le reflet du soleil sur l'eau ajoute un chatoiement que j'espère aussi magique en photo qu'en réalité.

Allez, il faut faire demi-tour, et c'est à ce moment là que je prends plaisir à compter les marches, les 122 merveilleuses marches. Curieux, je découvre que quelqu'un a gravé 125 sur la marche du haut. Je ne redescends pas les compter, mais je suis sur de moi !

Pas grand-chose à dire du retour vers le parking, sauf que la le chemin est plus large, sans doute utilisé de temps à autre par des engins forestiers ou pour l'entretien du ponton (qui penche de plus en plus vers le large…). L'humus et les aiguilles de pin forment un tapis qu'il est reposant comme tout de foule, et permet une bonne vitesse de marche. Ma petite boite à malice parle d'une moyenne de 3,8 km/h, ce qui m'impressionne moi-même au vu des dénivellations et de mon peu d'entrainement.

Je reviens sur mes pas pour le chemin de liaison, mais ce n'est pas comme parfois agaçant. On est vraiment tellement nulle part que c'est différent dans ce sens. Je reconnais juste un des troncs en travers du chemin, dont l'écorce flamboie comme l'or, et une fourmilière (modèle à grosses bébêtes) ainsi que l'allure du chemin, qui fait que je ne suis pas surpris du moment où je retrouve un chemin carrossable et ma voiture sur le parking.

Bilan, 14,8 km au lieu de 8… et vraiment content.

Je me change, je remets le t-shirt des éléphants après avoir déjeuné torse nu pour sécher. Ce midi (vers 15h), j'ai déjeuné d'une barre de céréales et d'un peu d'eau pendant que je sèche.

C'est très volontaire, pas envie de me charger de vivres en chemin.

Au retour, je démarre, et arrive un renne à coté du parking, un second allongé plus loi sur la route se lève et le rejoint. Nous jouons à cache-cache un moment, mais ils ne se laissent pas vraiment approcher, et disparaissent dans la forêt.

Je rentre, je finis de me changer et je commence le premier jet de ce journal. Suit le sauna, où je suis seul et qui se passe parfaitement, je rentre dans la chambre m'allonger un peu avant d'aller dîner.

Je commande une bière et un saumon grillé béarnaise (fameux, même si les cornichons de la béarnaise sont aigres-doux), et tandis que j'attends le plat en buvant la bière, la fillette de la table devant moi montre quelque chose à sa mère. Je me retourne, un renne est là entre l'hôtel et le lac. Il se laisse même approché par deux personnes avant de disparaitre. Il revient un moment plus tard (j'ai été servi entre temps), il est bien plus près du restaurant. Il est rejoint comme une fusée par un petit pas si petit que cela, qui se jette sur son pis avec une telle énergie que la pauvre en est vraiment secouée. Quelques minutes de tétées et la maman se lasse, s'éloigne et junior la suit. Cela c'est un restau pas banal, hein !

J'ai jeté un œil sur l'affiche à l'entrés du restau. Si j'ai bien compris, le 8, ils ont deux musiciens de 21h à 2h du matin. Heureusement que les bâtiments sont bien séparés et que je suis autant à l'abri qu'on puisse rêver.

Détail pratique, leur lecteur de carte bancaire fonctionne à nouveau. Youpi !

Voila pour cette belle journée de vacances, dont je termine le récit dans la salle commune de l'hôtel – enfin commune rien que pour moi…

J'ai découvert qu'elle abritait un four micro-onde et une bouilloire. Si par hasard je passe en ville dans les sept jours (ce qui n'est pas du tout sûr, au contraire), cela pourrait permettre un peu de variété. Au mur, un poster de poissons avec l'indication de ceux qui sont fréquents ici me fait dire que j'ai vu des sandres et des perches.

Et tandis que je termine, je vois deux hommes préparer dans un abri en bord de lac un barbecue, sans doute pour leur pèche du jour.

Le soleil a moitié basculé derrière les arbres de l'autre berge, les nuages ont presque disparu. (le temps de relire un peu, il est parti, le soleil, mais la clarté n'a guère évolué, belles nuances de rose et de parme).

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